Non à la suppression de la qualification par le CNU

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Frédéric Torterat

#702 Une manoeuvre managériale et sociétale

2013-06-29 01:16

Ne nous le cachons pas : certains membres du Gouvernement et leurs alliés politiques cherchent à fragiliser la démocratie collégiale qui caractérise l'Université, mais aussi l'Université elle-même, dont l'une des missions principales consiste à conditionner l'enseignement à la recherche. En supprimant la qualification, on fait bien plus que "simplifier" les procédures : on retire peu à peu aux sections CNU toute légitimité, et on les condamne à moyen terme. Pourquoi au juste ? A quoi cela sert-il ? Madame Fioraso et consorts considèrent l'enseignement supérieur comme un "Bac+3", autrement dit comme un prolongement du Lycée, avec par la suite des masters répondant strictement "à la demande économique". Encore une fois, le travail (ici de recherche) est présenté comme un "coût", et un enseignant-chercheur "pèse" semble-t-il plus cher qu'un enseignant du secondaire, puisqu'il fait "moins d'heures". Vous avez donc compris de quoi il en retourne : faire du premier cycle un "Lycée bis" et du Baccalauréat non plus le premier diplôme universitaire, mais un certificat autorisant la "poursuite d'études".
Réfléchissez : vous comprendrez la manoeuvre.
Primo, je fragilise les CNU en supprimant les sélectivités dont elles ont la charge. Secundo, je supprime les CNU et je mets en difficulté les Comités de sélection. Tertio, je compromets un corps, celui des enseignants-chercheurs, et j'institutionnalise un corps générique et pour partie précaire d'"enseignants du supérieur", parmi lesquels j'aménage les services de celles et ceux qui font de la recherche. Une recherche dont je passe, peu à peu, la commande.
Voilà vous savez tout. Vous ne pourrez pas dire que vous n'étiez pas informés.

Réponses

colère

#712 Re: Une manoeuvre managériale et sociétale

2013-07-01 17:01:02

#702: Frédéric Torterat - Une manoeuvre managériale et sociétale

Je partage totalement le constat, mais comme le corps des enseignants-chercheurs n'a pas du tout l'esprit de corps, beaucoup considérant que le voisin en fait moins que lui (moins de recherche, moins d'heures de cours, moins de tâches administratives), il est probable que cette secondarisation de l'université (déjà bien entamée) ne s'arrête pas de sitôt. Les notaires savent bien mieux se défendre. Nous autres universitaires, cela fait des décennies que la situation se dégrade sans vraiment susciter de réactions: revenus minables qui font fuir beaucoup de jeunes talentueux, travail administratif chronophage à l'opposé de ce qui a pu susciter notre vocation, enseignement pauvre pour taux de réussite acceptable, etc...

Pourquoi nos élus se priveraient-ils de tondre progressivement les universitaires ? D'ailleurs, ils n'envoient pas leurs enfants à l'université. L'ascenseur social, pour eux, c'est réserver des places aux jeunes des cités dans les classes préparatoires. Tout est dit...

mcf vac

#719 Re: Une manoeuvre managériale et sociétale

2013-07-04 12:31:51

#702: Frédéric Torterat - Une manoeuvre managériale et sociétale

Le double statut d'enseignant chercheur est une aberration. J'ai enseigné en tant que maître de conférence pendant 7 ans en vacataire (je n'ai pas réussit à être qualifiée....). J'ai croisé de très bons chercheurs (certains de renommée internationale) qui se retrouvaient à devoir enseigner en licence 1 ou 2 !! vous imaginez le manque d'enthousiasme de ces chercheurs qui se retrouvaient à enseigner devant un public sortant du lycée..... Des personnes comme ça, il faut les cibler minimum en master, les positionner en HDR ou les laisser faire de la recherche à temps plein !

En outre, enseigner demande un certain talent pédagogique qui va bien au-delà de balancer un diaporama qui est lu pendant 3 heures, ou encore, de dire aux étudiants d'acheter le bouquin du prof afin qu'ils le lisent en coeur en amphi ??? les bons enseignants que j'ai croisé, qui prenaient du temps à aider les étudiants (demandeurs d'attention !), étaient tellement débordés par leur activité pédagogique pour accompagner les apprenants, qu'ils n'avaient pas de temps pour la recherche et se faisaient taper sur les doigts.

Ca ne gêne personne le taux d'échec des étudiants en 1ère année de fac ? de voir la moitié des effectifs abandonner à la fin d'un premier semestre ? de voir des étudiants jeunes, qui sortent du lycée, lachés ainsi sans avoir un référent ou des enseignants qui les suivents sérieusement ?

Il faut supprimer le CNU et remettre à plat toute l'organisation des enseignements en fac qui n'est vraiment pas porteuse de réussite. Et personnellement, je n'inscrirais pas mes enfants à la fac....